
Originaires du nord du pays, les Gnassingbé à la tête du pays depuis plus de cinquante ans, surfent sur une base régionale. Le septentrion du pays où ils disposent d’un vivier électoral. Cependant, cette assurance s’effrite au fil des ans. Des voix du nord sortent de leur mutisme et critiquent ouvertement la gestion du pays par les Gnassingbé.
Au Togo, deux faits importants dominent l’actualité. La sortie des évêques du Togo et l’arrestation du rappeur Amron. Les hommes de Dieu se sont prononcés 26 mai dernier sur la situation socio-politique actuelle que traverse le Togo. Ils ont dépeint un tableau sans ambages. « Le pays court un risque en couvrant les frustrations ; car une Nation ne se bâtit pas durablement sur le silence imposé, sur la peur suscitée et entretenue, sur le mépris de la voix de son Peuple ou encore sur un entêtement à faire croire au Peuple, le contraire du vrai. Leurs peurs et les frustrations tues, se muent en actes désespérés, et les colères muettes deviennent des déflagrations imprévisibles », ont soulevé les prélats.
Un constat fait depuis belle lurette mais qui s’est exacerbé avec l’adoption rocambolesque de la 5ème République. Dans la lettre épiscopale, ils ont fait part de leur inquiétude par rapport à la situation qui prévaut actuellement au Togo. Silence imposé, mépris de la voix du Peuple, frustrations, entêtement à faire croire au Peuple le contraire du vrai, sont entre autres, les points saillants de leur sortie. La réaction des évêques qui ne sont pas à leur première est salutaire. C’est une voix, non des moindres, qui s’ajoute à plusieurs autres. Parmi elles, celle du rappeur Amron.
Amron, Gnakadé, Boko, Olivier Amah…
Il a été arrêté dans la nuit du lundi 26 mai dernier. Son tort est d’avoir critiqué le régime de Faure Gnassingbé de l’ethnie Kabyè comme lui. Promis à une carrière musicale prometteuse, Amron est comme une étoile filante dans un showbiz togolais truffé de gens malhonnêtes. Après un moment de « traversée de désert » musical, il s’est tourné vers le terrain de l’engagement citoyen. Ses prises de position sont dirigées contre le régime de Faure Gnassingbé. De son vrai nom Narcisse Tchala Essowè, le rappeur vient de la même région que l’actuel Président du Conseil des ministres. Pas seulement. C’est un « enfant du système ». Son père a travaillé avec les Gnassingbé. Mais il a décidé de ne pas rester insensible à la situation que vit son pays sous la botte d’une seule famille. Ce qui lui vaut des ennuis.

Bien avant son acte courageux de dire tout haut ce que certains Kabyè pensent bas, il y a des prédécesseurs. Ils sont de plus en plus nombreux à briser le silence, à sortir de cette carapace de complices du régime qui leur colle à tort ou à raison à la peau. Parmi ces voix du nord décidées à ne plus se taire sur le drame que vit leur pays le Togo, Marguerite Gnakadé. Ex-ministre des Armées, elle critique la gestion chaotique du pays dirigé depuis 20 ans par Faure Gnassingbé. Son brûlot sorti 02 mai dernier, la veille de la prestation de serment du président du Conseil, est saluée par l’ensemble des Togolais. Des partis politiques et des acteurs de la société civile l’ont félicitée pour sa bravoure. « Le Togo a besoin d’un nouveau départ sans Faure Gnassingbé pour enfin reconstruire une République au service de nous tous », a-t-elle déclaré en substance dans sa sortie. Un pamphlet dans lequel l’ancienne ministre a énuméré les secteurs dans lesquels Faure Gnassingbé dès sa prise de pouvoir dans le sang en 2005. Santé, éducation, infrastructures, OTR, banques publiques, électricité, entre autres, sont les secteurs épinglés par Marguerite Gnakadé. Un tableau pas très reluisant du pays.
Parmi ces voix dissidentes du nord, il y a François Boko. L’ancien ministre de l’Intérieur aujourd’hui en exile en France depuis 2005 est sans doute l’élément déclencheur. Depuis son pays d’adoption, il ne cesse de contester la légitimité de Faure Gnassingbé. A sa suite, on notera l’engagement du colonel Olivier Amah (en exile au Ghana), Tikpi Atchadam réfugié en Guinée-Conakry et bien d’autres qui sont anonymes.
Benoît G.