
L’ambition de Faure Gnassingbé de faire adhérer le Togo à l’AES ne va pas se concrétiser dans un futur proche. L’organisation qui regroupe les Etats ayant fait sécession de la CEDEAO n’est pas prête à accueillir de nouveaux membres. Cette précision a été apportée par le président-putschiste burkinabé Ibrahim Traoré.
Lors d’une interview accordée à la chaîne russe Russia Today (RT), le chef de la junte militaire au pouvoir au Burkina Faso a donné des précisions sur la confédération des Etats de l’Alliance du Sahel (AES). Relativement aux éventuelles nouvelles adhésions.
« Oui, dans le futur. Mais pour l’instant, nous devons harmoniser beaucoup de choses, mettre en place les bases… Il y a beaucoup de protocoles additionnels pour harmoniser nos politiques avant de permettre que d’autres pays puissent s’ajouter », a déclaré sans détour le tombeur de Paul-Henry Sandaogo Damiba.
En d’autres termes, l’ouverture de l’AES à d’autres pays n’est pour demain. Il faut attendre encore un peu, peut-être même indéfiniment.
L’une des raisons de ce refus d’ouverture réside dans la genèse même de l’AES. Point n’est besoin de rappeler que les trois pays composant cette confédération sont tous dirigés par des militaires qui ont pris le pouvoir à l’issue de coups d’État. A ce titre, ils ne peuvent admettre en leur sein que des semblables. Des hommes qui ont perpétré un coup d’État militaire, rompu tout lien avec la France, règnent par les armes et nourrissent l’ambition de rester indéfiniment au pouvoir. Le tout sur fond de populisme.
Une autre raison, ces putschistes sont dans une certaine méfiance vis-à-vis des chefs d’État de la CEDEAO, y compris ceux qui pensent avoir leur confiance. Tous peuvent leur faire des crocs-en-jambe à tout moment, pour sauvegarder leurs intérêts.
Enfin, étant dans une logique notoirement antidémocratique, ils ne prendraient jamais le risque d’ouvrir l’AES à des pays dont l’opinion aspire à plus de libertés individuelles. Eux qui pourchassent les journalistes, prononcent la dissolution des partis politiques, interdisent et étouffent tout mouvement de contestation. L’AES est allergique aux critiques.
Au-delà, cette sortie de Ibrahim Traoré est une douche froide pour la diplomatie togolaise.
Douche froide pour Lomé
A n’en point douter, la déclaration de Ibrahim Traoré est une adresse à la diplomatie togolaise et aux dirigeants de ce pays. Et pour cause, le régime togolais est le seul de la CEDEAO a crier sur tous les toits ses ambitions de rejoindre l’AES. En janvier 2025, le ministre des Affaires étranges – lisez plutôt étrangères – du Togo a souligné dans une interview la possibilité pour le pays de rejoindre l’AES, déclarant même que les Togolais y seraient majoritairement favorables. «Demandez aux populations togolaises si le Togo veut entrer dans l’AES, vous allez voir leur réponse, je vous dirais qu’elles vous diront oui », a-t-il déclaré.
En mars, Robert Dussey en remet une couche. Sur sa page Facebook, il écrit : « Le Togo envisage de rejoindre l’Alliance des États du Sahel (AES), une décision stratégique qui pourrait renforcer la coopération régionale et offrir un accès à la mer aux pays membres. Une démarche qui suscite l’intérêt et marque un tournant dans la politique africaine ».
En effet, toutes ces déclarations et les démarches qui l’accompagnent ne sont guère l’expression d’ambitions. Il s’agit de manœuvres qui s’inscrivent dans le cadre d’une guerre commerciale Lire : Togo-Ghana : Guerre commerciale autour des pays de l’AES ?, mais aussi de diversion destinée à faire parler du Togo à l’extérieur pour masquer les différentes crises qui sévissent dans le pays. Et malheureusement, ils parviennent à leurs fins.
En refusant de s’ouvrir au Togo, Ibrahim Traoré et ses camarades mettent un terme aux manœuvres de diversion de Faure Gnassingbé et son ministre des Affaires étrangères. Mais aussi et surtout, ils disent niet à un partenaire aux positionnements assez flous. Une diplomatie qui n’a aucune limite. Ce flou diplomatique n’est pas pour rassurer les putschistes.
Enfin, avec l’échec de la manipulation de la masse autour de l’adhésion à l’AES, Robert Dussey doit chercher une autre trouvaille pour divertir l’opinion internationale.
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