
Le processus de mise en place des institutions de la Ve République se poursuit au Togo. Après les sénatoriales du 15 février 2025 dont les résultats ont été définitivement proclamés le 24 février par la Cour constitutionnelle, le président de la République a procédé à la nomination des 20 sénateurs relevant de ses prérogatives. Par décret n°2025-23/PR du 05 mars 2025.
Parmi les sénateurs nommés par Faure Gnassingbé, on retrouve des noms bien connus dans la classe politique togolaise. Akouete Yaovi Beliki de la CPP, Alipui Sénanu Kokou de l’UFC, Kagbara Uleija Innocent du PDP, l’ancien Premier ministre Koffigoh Kokou Joseph, Kolani Lardja (ancien président de la CENI), Tchassona Traoré Mouhamed du MCD et Kaboua Essokoyo Abass du MRC.
Autres nominations remarquables, celles de l’universitaire Kpégba Kafui (Vice-présidente de l’Université de Lomé) et de Bouraïma Inoussa (président de l’Union musulmane du Togo -UMT). L’ancienne ministre du commerce, Balouki-Legzim Bernadette fait également son grand retour.
Cette nomination rappelle le tweet d’un député français en réponse à la désignation en septembre 2024 de Michel Barnier comme Premier ministre par Emmanuel Macron. Il écrivait qu’«on fait du Jurassic Park en permanence en allant rechercher des fossiles à qui on essaye de redonner vie ». Passons !
La docilité récompensée
Une question se pose suite à la désignation de certaines personnes se réclamant de l’opposition. On sait que l’Union de forces de changement (UFC) est officiellement en alliance avec le pouvoir depuis bientôt 15 ans. Le parti de Gilchrist Olympio ne devrait plus se réclamer de l’opposition, et la nomination de Sénanu Kokou Alipui n’est que logique.
Par contre, il y a les autres qui doivent s’y prendre toute leur vie pour expliquer aux Togolais qu’ils sont encore membres de l’opposition après avoir accepté, voire quémander une nomination de Faure Gnassingbé.
La stratégie pour attirer l’attention des cadres d’UNIR et envoyer un message à qui de droit sur leur docilité est très simple. Il faut parler de la vie sociopolitique du pays sans vraiment toucher les points sensibles. Eviter les sujets tels que le changement de la constitution, le régime parlementaire, les difficultés des populations à se nourrir, la violation des droits de l’homme, les élections gagnées avant leur organisation, etc. Bref, ne pas aborder les sujets qui fâchent l’adversaire politique. C’est ce que certains ont fait.
Il nous est arrivé de proposer un protocole d’interview à certains acteurs politiques. Ils ont simplement décliné l’offre préférant accorder des interviews pour faire découvrir aux Togolais qu’il est obligatoire de composer le numéro de téléphone de celui que l’on veut joindre ; qu’il fait jour le matin et que le soir la nuit tombe ; que le maïs est différent du haricot. Bref, des choses d’une futilité inouïe.
Gerry Taama manque à l’appel
Dans le lot, celui dont le nom ne figure pas sur la liste est l’ancien président du NET, Gerry Taama. L’homme de Siou n’a pas été récompensé. Et pour cause, il n’a rien fait pour mériter une quelconque récompense. Au lieu d’adopter la stratégie de ses camarades « opposants recto-verso », il a osé émettre des critiques, surtout au moment de l’adoption de la nouvelle constitution. Nous saluons son courage, car on ne peut pas être éternellement insensible aux aspirations d’un peuple.
Pour l’avoir ouvert, il a été écarté et sa tentative de retour sur la scène politique a été « empêchée ». Il paie pour sa rébellion puisque ceux qui ont été « sages » sont à présent récompensés. C’est le propre d’un régime où la méritocratie peine à exister.