Togo: la justice sélective en marche
L’affaire « Frère Hounvi » du surnom d’un journaliste béninois enlevé à Lomé puis présenté à la justice béninoise refait surface. Dans un communiqué, le procureur de la République donne des précisions sur les circonstances de cet enlèvement qui risque de pourrir davantage les relations déjà tendues entre les dirigeants togolais et béninois.
Selon le communiqué, Steve Amoussou, de son vrai nom, a été enlevé à Lomé, au quartier Adidogome, et conduit vers une destination inconnue par des individus non identifiés. C’était la nuit du 12 août 2024. Des précisions ont ensuite été données sur l’identité des ravisseurs et leurs complices qui, eux, ont été arrêtés et présentés à la justice le 23 août 2024.
Nous pouvons féliciter les autorités judiciaires pour la célérité avec laquelle ce dossier a été traité. En quatorze jours, les investigations ont abouti à identifier les auteurs. Cela démontre la capacité de la justice togolaise a enquêter. Toutefois, il est impossible de s’en réjouir.
En effet, il s’agit là d’une énième preuve que la justice togolaise n’est pas une justice équitable. Elle est hautement sélective et ne sert visiblement que les intérêts du pouvoir. Sinon, comment comprendre en deux semaines, on est arrivé à découvrir le réseau qui a organisé l’enlèvement de Steve Amoussou et qu’au même moment, certains dossiers traînent au tribunal de Lomé.
On peut citer le dossier Tigre Révolution dont les prévenus sont en attente de leur jugement depuis 2019, l’affaire Joseph Kokou Zoumekey dans lequel l’assassin n’est pas connu depuis 2017, le dossier Idrissou Moufidou du nom de l’enfant tué à Togbékopé lors d’une manifestation en décembre 2018, etc. Deux meurtres d’enfants restés impunis jusqu’à ce jour.
Il y a aussi le scandale de la gestion des fonds alloués à la FTF pour la participation aux CAN 2013 et 2017, et le dossier des détournements des fonds de la route Lomé-Vogan-Anfoin. Affaires sur lesquelles l’ancien président de la Haute autorité de protection et de lutte contre la corruption et les infractions assimilées (HAPLUCIA) promettait la saisie de la justice depuis février 2019. Il a quitté ses fonctions sans avoir pu aider à faire la lumière sur ces scandales.
Si tous les dossiers précédemment cités sont jetés dans les oubliettes, c’est parce que faire la lumière dessus ne sert pas les intérêts du pouvoir.
Jean-Baptiste Edina