Economie

Abattoir principal de Lomé : des chiffres qui donnent du tournis

Alors que les conditions d’hygiène d’abattage et de commercialisation de la viande sont toujours insatisfaisantes, l’Office national des abattoirs et frigorifiques (ONAF) ferait pourtant des recettes mirobolantes qui devraient aider à améliorer ses services. Retour sur un organise qui fait du chiffre.

L’ONAF assis sur des milliards ?

On ne parlera pas de la poule aux œufs d’or (d’ailleurs on n’est pas dans la cour des gallinacées) ni du veau d’or (comme dans la Bible) mais du « bœuf d’or ». Et ce ne serait pas abusif. Car en appuyant sur une calculatrice, les chiffres qui sortent sont faramineux. Ils donnent tout simplement du tournis.

«On tue entre 100 et 150 bœufs par jour et sur chaque animal l’ONAF prélève 4500 FCFA», nous dit un boucher. Selon qu’on multiplie 4500 FCFA par 100 ou 150 bœufs, on se retrouve entre 450.000 FCFA et 675.000 FCFA comme la moyenne de taxes collectées pour un seul jour de la semaine. En un mois, on a 13. 500.000 FCFA et 20.250.000 FCFA. En appuyant toujours sur la calculatrice et cette fois, en faisant une projection sur une année, les taxes collectées par l’office sont estimées à 162.000.000 FCFA et 243.000.000 FCFA.

En réalité, ces données devraient avoisiner 1 milliard ou dépasser.  Voici pourquoi. Au cours de notre enquête, il nous a été révélé qu’il y a des périodes où uniquement à l’abattoir principal de Lomé, plus de 300 bœufs sont tués en un seul jour. Ce sont généralement les week-ends ou lors des périodes de fêtes. A côté de ces grands ruminants, il y aussi les petits qui sont abattus. Ces calculs sont faits uniquement en tenant compte de l’abattoir principal de Lomé. La structure gère d’autres abattoirs. Pendant que ces taxes sont collectées, dans quelles conditions les animaux sont tués ?

Installation vétuste

Agbadahonou au Grand marché de Lomé. Sous une chaleur étouffante de la journée d’hier jeudi 02 mars, nous sommes entrés dans la boucherie. Les bouchers s’affairaient. Tabliers souillés et debout derrière de larges tables sur lesquelles sont posées des balances, ils donnaient des coups de machettes à des carcasses. D’autres, munis de canifs découpaient les morceaux de viande. D’autres encore, ensachaient les steaks (après les avoir pesés) pour leurs clients. La scène qui se déroulait dans ce bâtiment, est une séquence de la chaîne de la production de produits carnés au Togo. En effet, à l’abattoir principal de Lomé se déroule, les activités d’un autre maillon essentiel. L’abattage des bêtes.

Là-bas, de grands et petits ruminants y sont convoyés tous les jours. Après les inspections des agents vétérinaires, les bêtes sont dirigés vers « le couloir de la mort ». Chaque boucher conduit son animal dans un grand bâtiment. La bête y laisse sa vie dans des conditions déplorables. «Ce sont les bouchers eux-mêmes qui tuent les bœufs à l’aide de machette », nous confie une source. Elle précise qu’il n’y a pas de machine qui puisse achever l’animal. «C’est de façon manuelle », souligne notre informateur. Un autre va plus loin. « L’ONAF ne nous fournit pas d’EPI (équipement de protection individuelle, Ndrl). Chaque boucher se débrouille comme il peut », ajoute-t-il.

Dans de telles conditions, les blessures ne sont pas rares. Elles constituent le lot des dangers auxquels sont exposés au quotidien les bouchers. « A la moindre inattention, la machette te fait une entaille », fait remarquer un jeune boucher qui totalise une quinzaine d’années dans le métier. Selon les informations recueillies auprès d’autres, ils organisent eux-mêmes les évacuations sanitaires des blessés.

Ces différentes descriptions de ce haut lieu du carnage révèlent en réalité son état. Le bâtiment est, sans exagération, désuet. Il est inadapté aux normes actuelles d’abattoirs. Et cela ne semble pas préoccuper l’administration. Maintes fois, il est annoncé la construction d’un abattoir moderne. La délocalisation n’est pas pour demain. Pendant ce temps, on continue de prélever les taxes sur chaque bœuf destiné à l’abattage.

Benoît EKLOU

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